Je me la joue feignante... une fois n'est pas coutume, pour vous parler de cet artcle qui fait suite à la journée "Nuit sécuritaire" de ce début de mois...
Je suis plus que jamais en colère et dans la bataille...
Article issu du site Marianne2. Jeudi 12 février.
Chaque société a la psychiatrie qu'elle mérite: à votre avis, on en est où en France?
Suite et fin de l'article de Philippe Petit consacré à la révolte des psychiatres réunis à Montreuil le 7 février dernier.
Le malaise n’est pas nouveau, mais il est permis de penser qu’il prendra fin.
« Quand on touche à un certain niveau de déshumanisation, la réaction peut devenir violente » précise Winter. Elle le fut à Montreuil où chacun s’accordait sur ce point. Il serait faux de dire que les soignants ne sont pas écoutés par les pouvoirs publics : ils ne sont pas entendus.
« On cherche à transformer toutes les catégories de soignants en santé mentale en technicien du psychisme ; nous devenons des distributeurs de médicaments, des experts en dangerosité. Nous devons trier, soigner, ou enfermer » s’est exclamé Émile Lambroso.
Tout se passe en effet comme si la souffrance psychique était réductible à un dysfonctionnement, et non considérée comme un conflit de l’individu avec lui-même. « Chaque société a la psychiatrie qu’elle mérite, de même que chaque société a la pathologie qu’elle mérite » a rappelé Roland Gori qui est à l’initiative de l’Appel des appels signé par plus de 66 000 personnes qui entendent fédérer la colère de toutes les professions opposées aux réformes en cours à l’université, comme au tribunal, à l’hôpital, voire dans les médias.
Il existe en effet un point commun à toutes ces revendications : elles réclament une véritable « culture des métiers ». « Ce que de toutes parts les équipes ressentent, c’est une mutation du métier, une forme de dépossession, de réduction de la décision qui se résume aujourd’hui à des aspects techniques où seule l’application d’un traitement filtré par l’évaluation du bénéfice et du risque occupe les esprits » a souligné Guy Dana.
Cette revanche du projet administratif sur le projet thérapeutique est une des conséquences de l’usage fallacieux que les experts peuvent faire de la science, en particulier de la génétique moléculaire. Telle est la rançon de l’hôpital entreprise. Elle autorise le formatage des malades autant que des praticiens hospitaliers. Elle prend le dossier de soin pour une agence de cotation. « Nous sommes atterrés de voir à quel statut d’outil sont réduits les professionnels agents d’une médecine dont le temps est dévoré par l’application de procédures standardisées, réduisant le temps consacré aux contacts humains » a rappelé Jean Claude Chaise, le représentant de l’UNAFAM (Union Nationale des Amis et Familles de Malades et Handicapés Psychiques).« Les rapports et les commissions sur la santé mentale se suivent et se ressemblent depuis dix ans »
L’alliance de la science mal comprise et de la gestion n’est donc pas un hasard. Le pouvoir politique a confisqué le pouvoir administratif. Les rapports et les commissions sur la santé mentale se suivent et se ressemblent depuis dix ans. Ils n’ont pu empêcher la bureaucratisation de l’hôpital. Ils n’ont pas vraiment amélioré l’aide éducative et la prévention des troubles. Cette dégradation du soin tient autant aux restrictions budgétaires qu’à la manière dont on s’acharne à pourrir le capital créatif des adultes, et en particulier de la jeunesse. « Adolescents, ils sont trop nombreux à nous dire qu’apprendre ne sert à rien (…) S’ils n’ont plus d’idée de métier dans lequel ils peuvent se projeter, n’était celle récurrente de devenir footballeur, ils me disent qu’ils veulent avoir de l’argent tout en me racontant leurs cauchemars : ils se voient pris par le camion des ordures et jetés à la décharge » a souligné la psychiatre et psychanalyste Liliane Irzenski qui travaille depuis trente ans en C.M.P.P. (Centre Médico-Psycho-Pédagogique).
Afin d’éviter que les déchets s’amoncellent, les révoltés de Montreuil ont prêté serment. Leur manifeste fera date. Il leur reste maintenant à prouver leur fidélité à cet engagement.